
Prépondérance immobilière et crédit-bail immobilier : un arrêt sans surprise de la Cour administrative d'appel de Versailles (CAA Versailles, 9 juillet 2025, n° 23VE00314)
Cour administrative d'appel de Versailles, 9 juillet 2025, n° 23VE00314, Immovesle
Dans un arrêt en date du 9 juillet 2025, la Cour administrative d’appel de Versailles a apporté plusieurs confirmations attendues sur les modalités d’appréciation de la prépondérance immobilière en matière d’impôt sur les sociétés, s’agissant de sociétés titulaires de contrats de crédit-bail immobilier.
En 2017, une société assujettie à l’impôt sur les sociétés a cédé les titres de deux SCI, chacune étant titulaire d’un contrat de crédit-bail immobilier portant sur un immeuble donné en sous-location. Les plus-values dégagées ont été déclarées au régime du long terme au taux de 0 %, la société estimant que ces SCI n’avaient pas la qualité de sociétés à prépondérance immobilière au sens de l’impôt sur les sociétés. L’administration fiscale a contesté cette analyse : considérant au contraire que les deux SCI étaient à prépondérance immobilière, elle a procédé à une rectification et soumis les plus-values au taux normal de l’impôt sur les sociétés. La société a contesté ce redressement devant le tribunal administratif de Versailles, qui a rejeté sa requête par un jugement du 15 décembre 2022. Elle a ensuite porté l’affaire devant la Cour administrative d’appel de Versailles.
La société soutenait que, pour déterminer le ratio de prépondérance immobilière, seuls les contrats inscrits à l’actif du bilan devaient être retenus, à l’exclusion de ceux simplement conclus et, par conséquent, non comptabilisés. A titre subsidiaire, la société avançait notamment que les droits issus d’un crédit-bail immobilier devaient être dissociés entre, d’une part, le droit au bail, de nature mobilière et donc à exclure du numérateur du ratio, et, d’autre part, le droit au bénéfice de la promesse de vente, de nature immobilière mais dépourvu de valeur avant la levée de l’option d’achat. Selon elle, le ratio de prépondérance immobilière demeurait, de toute façon, inférieur à 50 %.
La Cour administrative d’appel de Versailles a, sans surprise, rejeté l’argument principal, considérant qu’il n’y a pas lieu de distinguer entre les contrats de crédit-bail acquis et ceux simplement conclus : tous doivent être retenus pour apprécier la prépondérance immobilière.S’agissant de l’argument subsidiaire, les juges ont adopté une interprétation stricte de la loi, estimant que, quelles que soient leur nature et leur ventilation, l’ensemble des droits issus des contrats de crédit-bail doit, en tout état de cause, être inclus dans le numérateur pour le calcul du ratio de prépondérance immobilière.
Bien que défavorable au contribuable, cet arrêt nous paraît salutaire. D’une part, il repose sur une lecture cohérente du texte, conforme à son esprit et largement alignée sur la pratique des professionnels. D’autre part, retenir certains arguments du contribuable aurait entraîné des effets de bord particulièrement dommageables. Tout d’abord, exclure de l’analyse de la prépondérance immobilière les actifs non inscrits au bilan aurait, dans de nombreux cas, un impact négatif. Dans le secteur hôtelier, par exemple, la prise en compte du fonds de commerce — souvent non activé — permet, dans bien des cas, d’éviter la qualification de prépondérance immobilière au regard des droits d’enregistrement. Ensuite, affirmer qu’une promesse de vente est dépourvue de toute valeur irait à l’encontre de la pratique actuelle consistant, au contraire, à allouer une valeur significative à la promesse dans les opérations de cession de crédit-bail immobilier (la ventilation étant requise aux fins de la TVA et des droits d’enregistrement).
Pour finir, rappelons que cet arrêt ne concerne que la notion de prépondérance immobilière au regard de l’impôt sur les sociétés. Il faut garder à l’esprit que cette notion varie selon les impôts : certaines définitions n’intègrent pas les droits afférents à un crédit-bail immobilier, notamment en matière de droits d’enregistrement.
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