7.5.2025
Impôt sur les sociétés

Modalités d'interprétation de la clause de prépondérance immobilière de la convention fiscale franco-néerlandaise

Tribunal administratif de Montreil, 7 mai 2025, n° 2301787, Villiot HoldCo B.V.

Dans un jugement du 19 mars 2024, le tribunal administratif de Montreuil apporte une clarification importante sur l’interprétation de la convention fiscale franco-néerlandaise, dans un contexte de cession de titres d’une société d’investissement à prépondérance immobilière à capital variable (SPPICAV) par une société étrangère.

En 2017, la société néerlandaise Villiot HoldCo B.V. a cédé l’intégralité du capital de la SPPICAV française OPPCI Villiot, laquelle détenait principalement les parts de deux SCI, dont l’une possédait un ensemble immobilier à Paris. L’administration française a considéré que la plus-value générée lors de cette opération relevait du prélèvement prévu à l’article 244 bis A du CGI, estimant que les actions de la SPPICAV devaient être assimilées à des biens immobiliers. Elle a en conséquence assujetti la société néerlandaise à l’impôt, assorti de pénalités et d’intérêts de retard.

Le tribunal rejette cette analyse. Il rappelle que l’article 244 bis A assimile, en droit interne, les actions de SPPICAV à des biens immobiliers lorsque le cédant détient au moins 10 % du capital. Toutefois, il précise que cette qualification n’a pas nécessairement vocation à s’imposer dans le cadre conventionnel. En effet, la convention fiscale conclue entre la France et les Pays-Bas prévoit une règle spécifique pour l’imposition des gains en capital : son article 13 §1 distingue les gains provenant de l’aliénation de biens immobiliers de ceux résultant de la cession de titres dans une société dont l’actif est principalement immobilier.

Or, pour le tribunal, cette distinction implique que seules les sociétés détenant directement des biens immobiliers peuvent justifier une imposition en France. En l’espèce, l’OPPCI ne détenait pas directement les immeubles, mais via des SCI, de sorte que le lien avec les actifs immobiliers était indirect. Par suite, la plus-value litigieuse ne relève pas du paragraphe 1 de l’article 13, mais du paragraphe 4, aux termes duquel les gains sont imposables exclusivement dans l’État de résidence du cédant – en l’occurrence, les Pays-Bas.

Ce raisonnement s’appuie sur les commentaires du modèle OCDE, lesquels prévoient une interprétation restrictive du champ d’imposition des plus-values immobilières, notamment en excluant les cas de détention indirecte, sauf stipulation expresse contraire. Le tribunal juge donc que l’administration ne pouvait légalement soumettre cette plus-value au prélèvement prévu à l’article 244 bis A, ni appliquer les pénalités y afférentes.

L’État est en outre condamné à verser 1 500 € à la société au titre des frais exposés non compris dans les dépens.

Ce jugement illustre les limites de l’assimilation opérée par le droit interne entre actions de sociétés à prépondérance immobilière et biens immobiliers, lorsqu’une convention fiscale internationale est applicable. Il souligne également la nécessité de distinguer clairement la portée des qualifications retenues en droit interne et leur transposition dans le champ conventionnel – ce que la jurisprudence administrative tend, avec constance, à rappeler.

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